Il semblerait que l’on se trouve dans l’impossibilité absolutique et intrinsèque de créer quelque chose, chose que, précisément, nous essayons d’obtenir par la production – toujours plus utile – d’appareils technologiques sans précédent qui, sous couvert de nouveauté, servent invariablement à augmenter la dépense de chacun, un petit peu plus embêté à chaque fois, se demandant invariablement que faire de ça, de ce truc, de cet objet qui, après tout, n’a pour vertu que de remplir le porte-monnaie de certains (et de vider le vôtre, par la même occasion), et qui semble bien déterminé à rester en l’état. Car l’Etat où nous nous trouvons n’est pas un état intemporel. Le manque de création qui lui est inhérent nous force à constater qu’apparemment, l’impossibilité évoquée plus haut pourrait, par une révolution étatique de nos esprits – et seulement d’eux ! – ne plus être si absolutique que cela. Enfin, c’est ce qu’il me semble.
Regard sur la société de ce temps (Slam)
Telles sont les velléités de l’existence
Qu’on en perd tous la semence,
On en oublie le sens,
On en perd même l’essence.
Amoureux du paradis,
Fiers chevaliers de la vie
Que votre bel air gentil
Ne gâche pas votre utopie.
Pour tous les autres, capitalistes,
Centristes, et rationalistes,
Je n’ai qu’une chose à vous dire :
Ne devenez pas journalistes.
2018 © Anlouek – Tous droits réservés.
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J’ai pensé (Slam)
Éteignant mon ordi et sortant mon cahier
Je m’suis d’mandé sur quoi j’pouvais écrire.
Marre des chansons commencées et des poésies inachevées
Une fois lancé, je n’peux que finir.
Alors j’ai réfléchi silencieusement,
Et j’ai pensé à toutes sortes de choses
Qui mériteraient un traitement
Plus digne que de la prose
Penser passivement est une chose ;
Réfléchir activement est une osmose.
Pour créer y’a pas l’temps
Car on vit paresseusement.
Alors moi, grand-père qui vit en banlieue
J’ai pensé à mes ancêtres qui reposent aux cieux
J’ai pensé au soleil qui tombe,
Et à l’orage qui se forme.
Lorsqu’il éclairera ma tombe
Il révélera que j’étais un Homme.
Penser doucement n’est qu’une pause ;
Le vieil âge est souvent morose.
Pour créer on a pas l’temps,
J’ai vécu trop hâtivement.
Je m’suis l’vé tôt dans la nuit
Regardant Paris endormi.
J’ai pensé aux glaneurs
En enfilant mon bleu.
J’ai pensé à mon père
Qu’est resté au pays,
J’ai pensé à ma mère
Qui m’disait soit gentil.
S’activer tout l’temps c’est trop brusque
Réfléchir longtemps est un luxe.
Pour créer, ‘jamais d’temps
On travaille trop longtemps.
Voitures roulant, moi malheureux,
J’habite pourtant près du Perreux-
-Sur-Marne. Près d’l’autoroute j’verse mon quota
De larmes. Personne pense à moi,
J’fais qu’penser aux autres.
Mon désir : juste un toit,
Rien d’autre.
Marre de penser tous les matins pareil
‘Pas l’État qui m’ôtera des oreilles,
Le boucan d’l’autoroute,
Que j’mérite pas, sans doute.
Écrivain, lycéen, j’ai pensé
Voyant les feuilles s’amonceler ;
J’ai pensé à une amie, à qui j’disais un p’tit mot.
J’ai pensé au SDF, à la sortie du métro.
Penser sans rien faire
Devrait être éphémère.
Créer avec hâte pour les audacieux
Ceux qui n’ont pas de neveux :
On devrait l’faire sans soucis,
Au lieu d’aller voter,
Ou d’aller s’balader
Sur les Champs-Élysées.
Car la vie n’est pas qu’un crépuscule,
Et pourtant, elle est si minuscule.
Et pourtant, elle est si minuscule.
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